Soleil, pluie et brouillard un rallye pour grands garçons…

Après tout le stress dû aux annulations de rallye en France et en Belgique, malgré les grèves à Charleroi Airport et chez Total, les courageux organisateurs Ardéchois ont tenu bon et maintenu jusqu’au bout l’organisation de cette belle épreuve.

Réputé très sportif, sur les traces du rallye de Monte Carlo, ce rallye du championnat de France coefficient 2 est aussi ouvert aux voitures historiques VHRS et VHC qui profitent donc de l’infrastructure d’une épreuve à spéciales fermées et sécurisées pour un prix raisonnable.

Nous sommes une bonne colonie belge à être descendu sur place à Vals-les-Bains. Des courageux prêts à en découdre sur un terrain de jeu difficile bien éloigné de leurs habitudes.

Pierre Delettre et son équipier Lucien Letocart mènent cette troupe. L’organisateur des Boucles de Bastogne pilote ici une belle Escort MK 1 reconstruite « groupe 2 », les « Glaude » ont amené une Volvo 144 très boostée atypique en ce pays où les bombinettes françaises dominent sur un terrain de jeu qui leur convient parfaitement bien. Notre Porsche fera ce qu’elle peut comme la Sunbeam Talbot de Bernard Dreesens et Alex Paquay qui s’en tirera comme elle peut dans les pièges et le brouillard.

Tout le monde est à la fête…

Il pleut sur Vals-les-Bains, les routes sont glissantes de boue et de châtaignes écrasées, seul le brouillard est un surprenant invité de dernière minute…

Vendredi 21 octobre reconnaissances pluie et le brouillard !

Sur ce terrain tournicotant, avoir des notes « virage par virage » est quasi indispensable d’autant plus quand, comme cela semble se présenter, le brouillard s’invite à la fête.

Nous passons donc toute cette longue journée à prendre des notes virage par virage tout en contrôlant bien les distances car il s’agit aussi d’un rallye de régularité. Même s’il s’annonce comme très sportif.

La surprise du chef vient du ciel… Dès qu’on monte au-dessus de 800 mètres, on entre dans les nuages. Un brouillard à couper au couteau se mêle à une pluie cinglante. Heureusement que sur le plateau du Burzet, en attendant la neige, les fameux piquets orange avec leurs catadioptres bordent déjà les routes pour guider les voitures dans ce désert où les bourrasques à gueule blanche se fâchent comme à leur habitude.

Après une longue journée avec la Porsche, reprenant elle aussi ses marques, nous avons pu prendre un maximum de notes. Même si, par manque de temps, nous avons dû choisir entre les repérages « distances » et le « virage par virage », ce qui s’avérera un vrai problème. Adrien dispose cependant de bonnes notes de l’année passée qui pourront nous aider en cas de besoin.

Samedi 22 octobre, le train d’enfer imposé par Bernard, impossible à tenir dans le brouillard.

Notre groupe d’une cinquantaine de voitures du « VHRS » ferme la marche, précédé de quelques VHC, et d’une centaine de voitures « modernes » du championnat de France.

Dès la première spéciale Burzet, nous nous rendons compte qu’il faut y aller fort, nous sommes en retard quasi en permanence tout le long des 15 kms de la spéciale. Le « diable » Bernard Vialar, maître des moyennes, les a poussées haut, frôlant et dépassant même les 70 kms/h ! Nous ne nous plaignons pas car nous aimons cela, du pur plaisir même si on ne peut plus toujours appeler cela « rallye de régularité ».

En tous cas, nous nous rendons compte que nous ne pourrons pas jouer avec les plus grands qui, bien que pénalisés, réussissent l’exploit de vraiment limiter les dégâts.

Dans cet exercice nous nous classons au milieu de classement juste derrière l’Escort de Pierre Delettre, surprenant excellent pilote qui a le pied lourd. Ce premier passage est un bon repérage car chaque spéciale devra, en principe, être parcourue trois fois sur les deux jours…

A la fin de ce premier jour alors que la nuit est tombée, un brouillard épouvantable surprend tout le monde dans les deux dernières spéciales où Bernard, aussi surpris que nous, a maintenu malgré tout les mêmes moyennes élevées irréalisables. Dans ces conditions, cela devient un "cannonball" sans aucune visibilité dont nous sommes finalement très contents de sortir entiers...et sur la route !

Nous avions rarement vu autant de brouillard… En plus, lâchées toutes les 30 secondes dans cet enfer pour gagner du temps, les voitures se rattrapent et le stress des phares dans le rétro s’ajoute. Nous nous en sortons finalement pas trop mal. 18ème au général et second belges dans les échappements de l’ami Pierre Delettre.

Ce qui nous arrive rarement, nous avons plus de 1.000 point de pénalités sans cependant être ridicules…

Dimanche 23 octobre la bérézina du brouillard encore…

A Vals il fait sec, le soleil se montre même un peu. Mais ce n’est qu’une illusion. Dès qu’on lève les yeux, on se rend compte que ces foutues et belles montagnes sont noyées dans les nuages.

Les commentaires vont bon train, on ne parle que de brouillard, de sorties de route, de casses mécaniques… Les Glaude ont cassé la boîte de la Volvo, remplacée la nuit par la boîte de réserve de Pierre. Solidarité entre Belges oblige !

Mauvaise nouvelle, alors que l’heure de notre départ est venue, on nous annonce que le rallye restera bloqué à Vals. Dans la première spéciale de « Burzet », deux sorties de route assez graves, dont celle de la voiture ouvreuse, ont bloqué la route.

En retard, on nous laisse finalement quand même partir toutes les 30 secondes.

Arrivés au départ de « Burzet », c’est la désillusion… une grande file de voitures nous attend !

Les organisateurs, qui ont cette fois diminué les moyennes imposées, prennent quand même la décision de nous lâcher en section neutralisée, sans prise de temps…

Effectivement cette décision se justifie car au sommet de la spéciale, c’est à nouveau l’enfer blanc. Même à trente kms/h, on n’y voit rien !

Finalement, seule l’étape de Ray-Pic Burzet se fera disputer. C’est bien dommage, bien que justifié pour éviter d’aggraver le carnage.

Ce superbe rallye se termine ainsi, nous laissant un petit goût amer mais nous sommes tous entiers…

En VHRS victoire méritée de la Peugeot 205 GTI de SALLES RIFARD 187 points de pénalité au total… un exploit !

On ne saura jamais dire ce qu’aurait donné le classement sans les neutralisations.

Qui serait resté jusqu’au bout sur la route dans de telles conditions ?

Chapeau bas en tous cas aux premiers classés, jeunes gars aux dents longues, qui avancent avec des superbes petites bombes bien préparées.

On a fort évolué depuis les premières épreuves VHRS et c’est tant mieux ! Mais il faut faire attention à éviter les escalades trop rapides, c’est un terrain très délicat où il faut équilibrer le plaisir entre vitesses "sportives" et régularités raisonnable ???

Moi, j’ai fait mon choix je préfère piloter à fières allures, même en y trouvant humblement mes limites, plutôt que de flemmarder à 50 km/h dans de longues lignes droites comme cela nous est déjà arrivé dans certains rallyes où on se classe à la seconde... mais à chacun ses plaisirs, il suffit de choisir !

En tous cas chez Vialar, c’est du sport ! (le VHRS = Régularité "sportive")

Pour l’anecdote, notre Porsche se classe finalement 12ème au général de sa catégorie et deuxième belge, juste derrière Pierre Delettre l’homme "au pied lourd" et Lucien Letocard son vaillant équipier.

Belle bagarre entre deux générations et quel plaisir d’encore pouvoir participer à des épreuves comme celle-là ! Non, le rallye n’est pas mort continuons à le faire vivre certes dans le respect des autres mais aussi de nos belles traditions qui remontent quand même aux aurores de l’automobile dont nous protégeons ainsi au mieux une partie du patrimoine sportif ...

Raymond Collignon