La Turbotraction de Spirou a bien existé !

Bob d’Automag, Didgé    2004-12-09 00:00:00   


En 1954, les lecteurs du journal Spirou purent découvrir une voiture d’avant-garde destinée à supplanter le parc automobile de l’époque : la Turbotraction. Spirou et Fantasio partaient pour l’Afrique à la recherche des plans volés de cette voiture équipée d’un moteur à turbopropulsion.

Spirou & Fantasio découvrent la Turbotraction.

Le génial dessinateur de bandes dessinées André Franquin à qui nous devons également (entre autres) le Marsupilami et Gaston, a toujours suivi de près le monde des prototypes.

Dans l’album « La Corne du Rhinocéros », il nous présente une superbe voiture décapotable aux lignes fluides et aérodynamiques, très rapide avec une tenue de route exceptionnelle et un freinage puissant. Bref, la voiture idéale. Imaginaire, qui ne peut exister que dans l’esprit d’un artiste me direz-vous ... et bien non, cette voiture aérodynamique au Cx de 0,19 en avance sur son temps a bel et bien existé sous le nom de : SOCEMA-GREGOIRE

Ressemblance saisissante entre la Turbotraction de Franquin et la Sogéma-Grégoire.

Paris 1951, le Salon de l’automobile ouvre ses portes ...

Paris, le 3 octobre 1951, le 38e Salon de l’automobile ouvre ses portes. Face à la concurrence étrangère, la construction française brille d’un vif éclat. Après les années de guerre, d’occupation et de rationnement, l’ère du client-roi s’annonce. Sont présentes : Renault, Citroën, Peugeot, Simca, Panhard, mais aussi Bugatti, Delahaye, Delage, Salmson, Talbot ... et Hotchkiss.

En passant à côté du stand, l’ ?il est immédiatement attiré par une voiture de couleur rouge avec des flancs blancs aux formes rondes et aux chromes rutilants.

La luxueuse Hotchkiss-Grégoire.

Un homme de taille moyenne, mince, élégamment vêtu d’un costume croisé gris, surveille les derniers Préparatifs. En ce moment précis, Jean-Albert Grégoire vit un des plus grands moments d’une carrière déjà fertile : le lancement commercial de celle qu’il considère comme l’ ?uvre de sa vie et pour laquelle il travaille depuis près de dix ans : la Hotchkiss-Grégoire.

Jean-Albert Grégoire, fervent amateur de belles voitures rapides !

J-A Grégoire a eu un parcours atypique : joueur de rugby, champion de France du 100 mètres, docteur en droit, pilote de Harley Davidson et polytechnicien. Jeune ingénieur, il débute comme garagiste en 1925.

En 1927, avec son ami Pierre Fenaille, il fonde à Asnières la Société des Automobiles Tracta. Leur invention commune, le joint homocinétique Tracta rendit concevable la traction avant des automobiles. Il permettait d’éviter les à-coups dans la transmission lors du braquage des roues. J-A Grégoire en vendra la licence à la société américaine Bendix dès 1932.

Depuis l’époque des Tracta, J-A. Grégoire est un fervent amateur de belles voitures rapides. En compagnie de sa femme, il pose ici à côté d’un coupé Tracta 17CV type F carrossé par Duval. La photo est prise vers 1933.

Il participa également à la mise au point de la transmission de celle que tout le monde connaît sous le nom de traction avant mais refusera d’être appointé par Citroën, ne voulant pas agir en qualité de conseiller technique dans la fabrication.

L’homme a parfaitement compris que pour aller plus loin, de puissants appuis sont nécessaires. Dans les années 30, les recherches qu’il poursuit sur l’allègement des véhicules l’ont conduit à entamer une collaboration technique avec l’A F (Aluminium Français). Il est parvenu en quelque temps à cimenter des liens extrêmement durables dans les hautes sphères de l’industrie des alliages légers et de l’électricité.

A partir de 1947, Grégoire lie son destin à Hotchkiss. En 1949, la fabrication de la Grégoire R est suivie avec beaucoup d’attention par la presse.

La Socéma-Grégoire.

Au début des années 50, le moteur à turbine est à l’avant-garde de l’actualité. Beaucoup d’observateurs voient en lui le moteur de l’avenir et sont d’avis que, tout comme l’a fait l’aviation, l’automobile na va pas tarder à abandonner le moteur à pistons. Chrysler aux Etats-Unis, Rover en Angleterre, Fiat en Italie, travaillent alors à son expérimentation.

Le 23 juillet 1952, J-A. Grégoire auprès de la carrosserie Socéma-Grégoire en cours de fabrication chez Hotchkiss.

Au cours de l’été 1950, Grégoire entreprend une étude similaire. La turbine proprement dite est dessinée par un ingénieur de la SOCEMA, filiale de la CEM (Compagnie ElectroMécanique).

La responsabilité de J-A Grégoire porte essentiellement sur la réalisation de la carrosserie du futur véhicule. Il prendra en charge le lourd programme d’étude d’une carrosserie aérodynamique, conduite intérieure 2 places avec suspension à flexibilité variable. L’aérodynamisme est poussé jusqu’à un remarquable Cx de 0,19.

La maquette de la Socéma-Grégoire en soufflerie. Un Cx de 0,19 !!

La Socéma reprendra beaucoup d’éléments expérimentés sur la Grégoire R et la Hotchkiss-Grégoire. Evolution significative, les éléments d’alliage léger boulonnés entre eux, qui constituent la carcasse coulée sont de petites dimensions. Plus faciles à couler, les pièces sont plus faciles à assembler ...

L’implantation de la mécanique dans la Socéma-Grégoire.

Achevée pour le salon de Paris de 1953, la belle SOCEMA-GREGOIRE ne fut pas à hauteur des espérances. Elle roulera peu et connaîtra une carrière des plus discrètes. Aujourd’hui, les lignes de sa magnifique carrosserie Hotchkiss et son moteur à turbine peuvent être admirés au Musée Automobile de la Sarthe au Mans.

A LIRE :
 « Grégoire une aventure Hotchkiss » de Marc Antoine Colin.
 De la Grégoire "R" à la Grégoire Sport, cet ouvrage

retrace, de 1943 à 1960, un moment essentiel de "l’Aventure Automobile" de J.A. Grégoire. A l’aide de documents d’archives inexploités jusqu’à présent, illustré de près de 300 photos pour la plupart inédites, il permet au lecteur de pénétrer au coeur de l’éphémère destin de celle qu’on surnomma la voiture du demi-siècle : l’Hotchkiss-Grégoire. A découvrir absolument !

Vous pouvez retrouver cet ouvrage dans notre librairie Automag.

Vos commentaires

  • Le 14 décembre 2004 à 18:37, par placide En réponse à : > La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    bravo pour cet article.
    Ce qui me frappe, c’est également la ressemblance entre la photo de la Socema-Gregoire dénudée (chassis seul avec un conducteur au volant ) et la vignette de Franquin dans laquelle je-ne-sais-plus que Sheick ou Magnat a un accident avec sa Turbotraction :on la voit se "déshabiller" pendant son embardée.

  • Le 22 février 2005 à 18:27, par Zarakai En réponse à : > La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    exact, c’est le Cheik Ibn-Mah-Zoud qui détruit irrémédiablement la "RHINO I" dans l’histoire nommée "Vacances sans histoire"

    En fait, Franquin désirait depuis un moment changer la Turbotraction qui datait de ...1955 ! A l’issu d’un concours dans le journal SPIROU, c’est un design trés américanisé qui fut retenu pour la nouvelle turbotraction "RHINO II"... L’ennui, c’est qu’il fallait faire mourir l’ancienne ! Franquin a donc imaginé une histoire où Spirou et Fantasio se font piquer leur joyau sur la côte d’Azur par un Elir tête brulée et daltonien ! Mais je vous laisse découvrir la suite !

    Sinon, je regrette vraiment la "vieille" turbotraction dont les lignes font aujourd’hui toujours beaucoup d’effet. A côté la RHINO II avec son look à la Firebird fait vraiment ringarde maintenant...

    Pourrait-on rêver à ce qu’un constructeur développe un concept car ayant l’apparence de la merveille de Franquin ?

  • Le 7 avril 2006 à 00:32, par saint emett En réponse à : > La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    franco sbarro a bien realise un semblant de cette voiture sur base de cx citroen mais elle n est pas conforme au dessin du tres regrette franquin

  • Le 4 décembre 2006 à 10:21 En réponse à : > La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    vos voitures sont superbe mais je ne sais pas vraiment si des agent secret les ont piloter .

  • Le 18 février 2019 à 16:38, par Vincent Cattelain En réponse à : La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    Tachez de trouver une photo de Lancia Aurelia B52 Spider de 1953..la ressemblance avec la Turbotraction de Fantasio est saisissante..

  • Le 17 janvier à 19:06, par Jean Pichereau En réponse à : La Turbotraction de Spirou a bien existé !

    M. Cattelain à raison. La ressemblance est frappante comme on peut le voir sur cette photo d’une Lancia B 52. https://www.conceptcarz.com/profile...,22997/1953-lancia-aurelia-b52-pf200.aspx

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